Nous sommes le Samedi 21 décembre 2024 | 218 Connectés | La citation du jour : "Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière asséchée, le dernier poisson péché, l'homme va s'apercevoir que l'argent n'est pas comestible. " Citation amérindienne
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Arnaga : une carte postale de la Belle-Epoque !

En 2020, Arnaga offre un voyage à la Belle-Epoque durant laquelle les Rostand, leurs enfants, leurs domestiques s’installent à Cambo-les-Bains.

L’exposition, carte postale grandeur nature, dévoile une plongée intimiste dans la vie des Rostand, famille bourgeoise du début du 20ème siècle. En cette époque d’insouciance, le couple d’écrivain et leurs enfants quittent l’effervescente capitale pour le paisible Pays Basque.
C’est à l’apogée de la Belle-Epoque qu’Edmond Rostand fait bâtir Arnaga qu’il imagine comme un écrin somptueux aménagé avec les innovations les plus récentes (électricité, chauffage, téléphone). La famille s’établit dans ce cadre enchanteur en 1906.
En cette période de confinement sanitaire, la Villa Arnaga doit reporter son ouverture à une date qui n’est pas connue à l’heure actuelle. Afin de faire vivre ses collections, un focus sur un objet présenté dans l’exposition Arnaga à la Belle-Epoque est proposé.

Les visiteurs virtuels découvriront :

  • des objets encore jamais exposés comme l’épée originale de Sarah Bernhardt dans l’Aiglon – des portraits de Rosemonde Gérard ou Edmond Rostand avec leurs chiens qui illustrent leur
    attachement à quelques-uns de leurs quarante canidés
  • Des extraits de correspondances entre Edmond Rostand et des personnalités de l’époque comme Léon Blum qui relate un duel avec Pierre Veber (vidéo de l’époque à l’appui !)

Les Rostand à la Belle-époque.

L’expression « belle époque » a été forgée après la Première Guerre mondiale, au moment où la France comptait ses morts, ses blessés, ses mutilés, et faisait face à l’inflation et à la crise économique. Même si cette période a aussi connu la misère et la dureté de la condition paysanne et ouvrière, autant de faits indiscutables qui éloignent sensiblement cette quinzaine d’années d’un réel âge d’or. Cependant, quelques éléments concourent à rendre lumineuses ces années-là : l’embellie économique, les dernières splendeurs du franc germinal, l’essor de l’automobile, les débuts de l’aviation, le démarrage du cinématographe, et, par-dessus tout, l’exceptionnelle floraison artistique et musicale.
C’est à cette époque d’épanouissement culturel qu’Edmond Rostand rencontre le succès avec ses pièces Cyrano de Bergerac en 1897 puis l’Aiglon en 1900. Il est en cela, avec son épouse Rosemonde Gérard, un vrai représentant de la bourgeoisie intellectuelle de ce début du 20ème siècle.
Le couple profite des progrès de l’époque en matière d’innovation (électricité, architecture), de loisirs (automobiles) pour conjuguer leur style de vie moderne au calme du Pays basque.

De la capitale au Pays Basque : retraite d’une famille bourgeoise

1) une installation en famille
Edmond Rostand vient à Cambo-les-Bains sur les conseils de son médecin, le docteur Grancher. Il s’installe à la Villa Etchegorria avec sa famille, Rosemonde Gérard, ses enfants, Maurice et Jean et ses domestiques. Cette vie, loin de la trépidante capitale, lui convient bien.
« Pourquoi je suis revenu au Pays Basque ? Je n’en sais trop rien moi-même.(…) Pourquoi donc le Pays basque, où je n’ai vécu que peu de mois, m’a-t-il donné cette envie sourde d’y revenir, alors que d’autres endroits, où j’ai passé des années, m’ont laissé indifférent ? La maladie m’aurait-elle modifié en me rendant plus sensible aux influences extérieures ? »
Edmond Rostand n’est pas venu seul à Cambo-les-Bains. Sa famille l’accompagne : son épouse, Rosemonde Gérard, ses fils, Maurice, 9 ans, et Jean, 6 ans, Mme Sylvie Lee, la mère de Rosemonde et leurs nombreux domestiques. Paul Faure, ami et confident d’Edmond Rostand, évoque l’ambiance de la maisonnée lors de sa première visite à la Villa Etchegorria « Ce qui me frappa dès que j’eus franchi le seuil d’Etchegorria, c’est que tout respirait le bonheur. Les domestiques étaient prévenants ; de petits oiseaux chantaient dans une cage laquée ; les fenêtres ouvertes laissaient entrer le soleil qui passait à travers d’énormes mimosas. »

Plus tard, Eugène Rostand, le père d’Edmond rejoint la famille à Arnaga pour des raisons de santé ; il s’y éteint en 1915. Humaniste, engagé, poète, journaliste, il eut un impact considérable sur la vie de son fils. Il lui transmit les valeurs de partage et d’amour du prochain, traduites en poème : « (…) Souviens-toi que ta vie eut un rose matin, Une aube claire, et pense à ceux dont le destin Est depuis le berceau, pénible, triste, sombre, Qui n’ont pas eu d’amour et n’ont connu que l’ombre, Souviens-toi que ce sont tes frères… va vers eux… Pauvres déshérités innocents.(…) »

2) Arnaga : un dessein commun
La Belle-Epoque pour les Rostand est synonyme de leur installation définitive au Pays Basque avec la construction de la Villa Arnaga. Comme une large frange de cette bourgeoisie ouverte aux idées de progrès et d’invention, les Rostand se tournent vers les nouveautés et les innovations. Ils font appel à Joseph-Albert Tournaire, architecte de la Ville de Paris, pour bâtir leur rêve. La Villa et ses jardins reflètent l’audace du maître d’œuvre qui a réussi un syncrétisme de plusieurs styles. Les innovations techniques de la révolution industrielle se trouvent là magnifiées tout en restant discrètes : les réseaux électriques, téléphoniques, d’eau et de chauffage restent invisibles.
Jusqu’en 1850, la différence entre une grande villa rurale ou suburbaine et un château est minime, la clientèle restant la même. Dans la deuxième moitié du 19ème siècle et le début du 20ème, l’époque où les Rostand font bâtir Arnaga, la villa se définit comme une réduction d’un château, qui en reprend les caractéristiques mais en les miniaturisant et en les déformant. Le style est souvent très chargé, avec de nombreux détails d’architecture. Edmond Rostand, lui-même, imagine et conçoit bon nombre d’aménagements architecturaux s’inspirant de ses voyages en Pays basque et dans le nord de l’Espagne. Le Musée détient quelques-uns des croquis que le poète a tracés et repris par Joseph Tournaire. Cet éclectisme se retrouve dans plusieurs pièces de la Villa : classique dans la salle à manger, empire dans le bureau, orientalisme dans le fumoir et dans la garde-robe de Rosemonde, arts and craft dans le studio des enfants, mauresque dans les ouvertures du boudoir, …

ARNAGA

La sensibilité des deux poètes se retrouve dans les agencements d’intérieurs et des jardins. En témoigne cette anecdote de Raymond Lerouge, précepteur des enfants Rostand : « Après déjeuner, un des plaisirs favoris [d’Edmond Rostand] était de chercher de nouvelles combinaisons d’ameublement. C’était son jeu à lui, et il aimait qu’on y entrât. Que de fauteuils nous avons roulés ensemble; de tapis tirés, de tentures déployées de cadres accrochés et décrochés. Le poète trouvait là, du reste, l’occasion d’un bon exercice physique. »

3) Loisirs et occupations d’une famille bourgeoise
A Cambo-les-Bains, Edmond Rostand s’adonne à ses passe-temps favoris : la marche, l’équitation, la bicyclette et l’automobile. C’est au cours d’une de ses promenades à cheval qu’il découvre les terres qui deviendront le domaine d’Arnaga.
Rosemonde Gérard et ses deux fils sortent également à cheval dans les alentours. Jean Lamarque, qui les a croisés maintes fois sur la route de Larressore, les décrit ainsi : « Les deux enfants montaient admirablement à cheval ; parfois, les mignons cavaliers encadraient une de ces amazones dont la vision est devenue si rare sur nos routes modernes ; celle-ci, toute grâce et toute distinction, s’appelait : Rosemonde Gérard.. »2
Edmond Rostand, féru d’innovation, est un adepte des véhicules à moteur. Il acquiert successivement plusieurs voitures : une 15 HP Torpédo de la Société Française de la Daimler Motor un double phaéton de la même marque et un autre de la luxueuse marque Delaunay-Belleville ou encore une limousine fermée de la marque Renault. Le double phaéton est une automobile comportant deux banquettes se faisant face à l’avant.
C’est à bord de ces véhicules qu’il effectue ses voyages à Paris que la presse évoque avec force détails. Pour relier Cambo à Paris, L’Action française détaille en 1909 : « Il avait couvert 900 kilomètres en 22 heures, s’étant arrêté quelques minutes à Angoulême et une heure à Tours, pour déjeuner.»

L’escrime est également un loisir qu’affectionne Edmond Rostand. Maurice et Jean y sont initiés par un professeur, M. Hilbert. Des tournois sont régulièrement organisés et présidés par le couple Rostand.
« Il s’appelait M. Hilbert et devait nous apprendre, en vue de je ne sais quels duels futurs, le fleuret, l’épée et même le sabre ! Nounou en était éblouie ! Nous eûmes des gants, des masques hermétiques avec lesquels on ressemblait au Masque de Fer et des espèces de vestes en forme de cuirasse sur lesquelles s’arrêtaient les épées mouchetées. »
Enfin, la chasse et la pêche sont deux autres passe-temps auxquels d’adonne le poète parfois accompagné de son acteur fétiche : Constant Coquelin. Le Musée possède la canne à pêche du premier interprète de Cyrano de Bergerac présentée pour la première fois.
En famille, jeux, théâtre de marionnettes et musique sont des occupations régulières. Edmond Rostand, lui-même, se met en scène pour amuser ses enfants.
Jean Rostand, quant à lui, pratique dès l’enfance la chasse aux papillons et fouille le sol à la recherche d’insectes à observer. Paul Faure relate sa première rencontre avec Jean, « Quant à (…) Jean, (…) nous le trouvâmes au fond du jardin, étendu par terre, couché, vautré. Armé d’un couteau de table à manche de vermeil qu’il avait dû prendre dans quelque écrin de la salle à manger, il fouillait éperdument le sol. — Celui-ci, me dit son père, a la passion des insectes. »

Toutes ces activités deviendront des illustrations qui feront date dans l’histoire de la carte postale.

Littérature et amitiés culturelles entourent la famille à Arnaga

Le secrétaire et le confident : Louis Labat.
Louis Labat, né à Bayonne en 1867 et décédé à Sèvres en 1947 est connu pour avoir été le secrétaire d’Edmond Rostand (1868-1918). Il a été en outre, traducteur, journaliste et critique théâtral. Il est connu également comme poète, romancier et auteur dramatique.
Ce petit homme, mince et fluet, d’une prodigieuse activité, a été durant toutes ces années d’une parfaite honnêteté. En dépouillant pendant seize ans le courrier du poète, en le classant, en le clarifiant, en répondant à la plupart des lettres, il l’a soulagé d’un immense travail, il lui a permis de faire face à sa popularité, sans froisser trop de gens par un silence qui eût été sans lui presque obligatoire.
Dans le Comoedia, du 23 juillet 1908, le journal souligne l’importance du travail du secrétaire d’homme de lettres : « Il faut, pour réussir dans cette fonction délicate, du doigté, de l’intelligence, le goût des lettres et quelquefois même du talent. (…) Celui de M. Edmond Rostand est M. Louis Labat, excellent journaliste et grand amateur de photographie. M. Labat, qui habite Bayonne, vient tous les jours à Cambo se mettre à la disposition de l’illustre poète qui l’emploie. »

Après sa fonction de secrétaire, Louis Labat renoue avec sa passion d’auteur : la traduction.

Paul Faure : le confident et biographe
Paul Faure est un écrivain, né le 12 janvier 1876. Il est issu d’une famille bourgeoise du monde vinicole. Vivant à Bordeaux, la famille se rend en villégiature tous les étés à Saint-Jean de Luz. Après des études chez les Jésuites à Bordeaux puis auprès des Oratoriens en Seine-et-Marne, Paul Faure voyage beaucoup. Il l’écrit lui-même : « 18 ans, de l’argent, un pays d’un charme infiniment prenant : tout me faisait la vie belle. »
Paul Faure est également collaborateur occasionnel pour les plus grandes revues de l’époque, telles Les Annales ou L’Illustration. La première parution du texte Vingt ans d’intimité avec Edmond Rostand a lieu dans la revue Les Annales sur six numéros du 1er juillet au 1er octobre 1927. Le livre paraît un an plus tard.
Paul Faure se trouve être parmi les curieux et admirateurs du célèbre poète. Il devient au fil des années, un intime d’Edmond Rostand et partant un témoin privilégié. « Je voulus voir l’homme dont le nom sonnait à toute volée. Puisqu’un hasard me faisait son voisin, il me fallait essayer de l’apercevoir. » Il rencontre Edmond Rostand en octobre 1900 lors d’une réception chez le Docteur Grancher dans sa villa Rosaenia.

Les amitiés et personnalités littéraires
De nombreuses rencontres jalonnent la carrière d’Edmond Rostand desquelles naîtront des amitiés indéfectibles. A ses débuts, il fait la connaissance de Jules Renard, personnage tourmenté et envieux de son succès : « C’est le seul homme que je sois capable d’admirer en le détestant ». A Arnaga, ne viennent que des amis choisis par Rostand comme Anna de Noailles ou encore Léon Blum.
Anna Elisabeth de Brancovan, comtesse de Noailles (1876-1933)
« Ceux qui ne l’ont pas connue ignoreront toujours jusqu’où peut aller la force expressive du langage dans le poétique, le profond, le drôle. Et quand j’évoque le prodige de son éloquence, si l’on peut appeler ainsi la vie à l’état pur qui explosait en paroles, je songe moins à ces volontaires démonstrations où elle se divertissait. Elle appelait cela « faire feu des quatre pieds ». » Jean Rostand
La comtesse Anna de Noailles fait de nombreux séjours à Arnaga. Issue d’une grande famille roumaine, elle s’est imposée parmi les figures les plus brillantes du monde littéraire du début du 20ème siècle. Dès l’enfance, elle écrit des vers et s’intéresse aux poètes décadents et au scientisme (Renan, Zola, Camille Flammarion, Sully Prudhomme).

Henriette Rosine Bernard, dite Sarah Bernhardt
Tragédienne exigeante et fantasque, Sarah Bernhardt est sociétaire de la Comédie-Française quelques années. Elle en démissionne avec éclat en 1880 et crée sa propre compagnie. Elle se consacre alors à une série de tournées dans le monde entier, notamment en Angleterre, aux États- Unis et jusqu’en Australie. Elle s’installe en 1893 à Paris, où, après avoir dirigé le théâtre de la Porte- Saint-Martin, elle prend la direction du théâtre de la Renaissance. Cinq ans plus tard, elle fonde le théâtre qui portera son nom et qui est devenu le Théâtre de la Ville. Elle y joue la Dame aux camélias, la Princesse lointaine, Hamlet, et monte deux pièces d’Edmond Rostand : la Samaritaine (1897), et surtout l’Aiglon (1900), qui connaît deux cent cinquante représentations consécutives. Edmond Rostand, alité, n’assiste pas au triomphe de L’Aiglon, qu’elle campe avec ferveur en mars 1900. Il livre sa frustration à Paul Faure : « C’est de mon lit, l’oreille collée au Théâtrophone, que j’écoutais ma pièce, ce soir-là et les soirs d’après. La voix des acteurs, les mouvements du public, arrivaient bien jusqu’à moi, mais affaiblis, déformés. »6
L’OBJET INEDIT EXPOSE : l’épée originale de Sarah Bernhardt dans l’Aiglon. Acquise par la Villa Arnaga en 2019 grâce à un collectionneur passionné, l’épée rejoint le stick de scène de la célèbre actrice dans le fonds de collection.


La fascination d’Edmond Rostand pour cette actrice à la « voix d’or » (V.Hugo) prend la forme d’un sonnet lors d’une fête grandiose qui lui est consacrée en 1896 : la journée Sarah Bernhardt.
En ce temps sans folie, ardente, tu protestes! Tu dis des vers. Tu meurs d’amour. Ton vol se perd. Tu tends des bras de rêves, et puis des bras de chair. Et, quand Phèdre paraît, nous sommes tous incestes.
Avide de souffrir, tu t’ajoutas des cœurs; Nous avons vu couler – car ils coulent tes pleurs! – Toutes les larmes de nos âmes sur tes joues.
Mais aussi tu sais bien, Sarah, que quelquefois Tu sens furtivement se poser, quand tu joues, Les lèvres de Shakespeare aux bagues de tes doigts. »

Jules Renard
Ami cher d’Edmond Rostand, Jules Renard en est le contraire stylistique, dévoué à une prose pierreuse comme l’auteur de Cyrano l’était à une poésie luxuriante.
En 1895, Renard se lie d’amitié avec Edmond Rostand ; amitié difficile mêlée d’envie qui, si elle ne gêne pas son admiration pour Cyrano, se dévoile peu à peu dans le ton un peu aigre de ses lettres. Dans un passage de son Journal, il raconte la première de la pièce ; il y détecte immédiatement un chef d’œuvre. Mais à son enthousiasme se mêle aussitôt une tristesse littéraire : celle de n’avoir pas réussi à faire aussi bien que Rostand. Renard ne connaîtra le succès qu’avec Le Plaisir de rompre puis Le Pain de ménage. Rostand n’assistera jamais à l’une de ces représentations, malgré l’insistance de l’auteur. Il semblerait que Jules Renard admirait Mme Rostand comme, dans la pièce, Pierre admire Marthe…
Dans une lettre du 28 décembre 1897 adressée à Rosemonde Gérard, il loue la pièce Cyrano de Bergerac avec sa célèbre phrase « Ainsi, il y a un chef-d’œuvre de plus au monde » et termine son courrier par ces phrases : « Je vous jure en toute humilité (oh ! elle m’est rare,) que je me sais bien inférieur à ce beau génie lucide qu’est Edmond Rostand. Tenez ! J’embrasse sa femme et je m’imagine le faire par une sorte de surprise honteuse, comme un Christian qui ne serait pas beau. Mais je n’en finirais plus, et je vous embrasse tout de même, pour me taire. ». Cette lettre est exposée dans la bibliothèque d’Arnaga.

Pierre Loti
Pierre Loti rencontre Edmond Rostand à Arnaga par l’entremise de Paul Faure en 1912. « Le dîner fut très gai. Le hall, la bibliothèque, le vestibule, le salon n’étaient que fleurs et lumières. (…) Des chœurs, que Rostand avait installés sur la terrasse où donne la salle à manger, firent entendre tout à coup de vieux airs basques. Loti, qui était en train de parler de l’Inde et de son admiration pour Kipling, se tut pour écouter ces chants d’autrefois, qu’il adore. » (Paul Faure)

Jean Cocteau
Contacté par Jean Cocteau pour publier ses poèmes en 1909, Maurice se lance avec lui dans l’édition la revue Schéhérazade, qui aura six livraisons de novembre 1909 à mars 1911. A la même époque, Jean Cocteau a une intense activité littéraire, il publie des articles et des dessins dans Comoedia et son premier recueil de poèmes, La Lampe d’Aladin paraît. Durant l’été 1909, il est au Pays Basque, hébergé à l’Hôtel Colbert, réputé dans la station climatique. Chaque après-midi, Maurice, la boutonnière fleurie, la chevelure ondulée et flottant au vent, venait chercher en calèche son nouvel ami. Il l’amenait à Biarritz, le plus souvent pour y rencontrer quelques-unes de ces baronnes ou vicomtesses de lettres, collaboratrices de Schéhérazade et habituées des réunions poétiques de la Duchesse de Rohan. Fin septembre 1912, Jean Cocteau rend de nouveau visite aux Rostand à Arnaga.
Cependant, les relations entre Jean Cocteau et Edmond Rostand se délitent suite à un événement gênant pour la famille. Pour sa dernière soirée passée à Cambo, Jean Cocteau organisa pour Maurice des bacchanales dans les jardins d’Arnaga. L’affaire aurait pu faire grand bruit mais Edmond Rostand parvint à l’étouffer tout en exigeant de son fils qu’il ne fréquente plus Jean Cocteau. Bien entendu, il ne fut plus question de préfacer le livre de vers du jeune auteur. La Danse de Sophocle parut sans le patronage tant espéré d’Edmond Rostand.
Des visites de Cocteau à Arnaga, deux curieux dessins portent témoignages. L’un, au moins, peut être vu au Musée d’Arnaga : un croquis, par Rostand, de Cocteau, dont le visage aigu s’ornait alors d’une fine petite moustache de torero.
Cocteau a publié dans ses Portraits-Souvenir un dessin d’Edmond Rostand, épanoui à la façon d’un chrysanthème. Dans ses Portraits- Souvenir, « souvenirs en surface » de la Belle Époque, Cocteau plonge dans le monde de son enfance et de ses premières expériences dans le milieu littéraire et artistique d’avant 1914.

Raymond Poincaré
En octobre 1913, Raymond Poincaré, récemment élu Président de la République, s’arrête en Pays Basque avant un voyage officiel en Espagne. Accompagné de sa femme, ils font escale chez les Rostand à Arnaga. Tandis que le Président passe seul les Pyrénées, Mme Poincaré reste chez le couple de poètes. On lui donne la plus belle chambre, appelée depuis « chambre du Président », bien que Monsieur Poincaré n’y ait passé qu’une seule nuit. Les enfants des écoles de Cambo vinrent offrir une gerbe de fleurs à la Première Dame et lui réciter un compliment dans le jardin empanaché de jets d’eau.
Mme Poincaré revient en 1929 à Arnaga à l’époque où le domaine appartient à la famille Souza-Costa.

Léon Blum
Avant d’être un homme politique célèbre durant le Front populaire, Léon Blum est un critique de théâtre dans plusieurs revues. Considéré par l’opinion comme un critique de talent, apprécié du public et des lecteurs de périodiques, il est aussi un critique contesté en raison de ses critères de choix. Emile Faguet qui lui reconnaît de la finesse, du goût, un sens psychologique estime cependant que ses passions politiques gâtent ces qualités.
En 1912, il relate à Edmond Rostand un incident qui l’opposa à l’auteur Pierre Veber qui n’est autre que le frère de Jean Veber, le peintre de la frise des contes de fées du boudoir de Rosemonde Gérard.
Le 9 octobre, Léon Blum assiste à la générale d’Une loge pour Faust, de Pierre Veber. Les deux hommes se connaissent parfaitement. Ils ont tous deux collaboré, il y a quelques années, à La Revue blanche, une publication littéraire d’avant-garde. Depuis, ils se sont brouillés. Veber n’a pas goûté la critique de Blum sur l’une de ses pièces. Beau-frère de Veber et grand ami de Blum, Tristan Bernard s’est mis en tête de les réconcilier. Cet auteur de théâtre et d’esprit a donc prié son cher Blum de faire un geste en venant à la représentation de Faust. Veber, peu reconnaissant, a souffleté l’impoli. Blum, offensé, lui a envoyé ses témoins. Le 14 octobre, à 11h au vélodrome du Parc-des-Princes, un duel à l’épée oppose les deux hommes. La blessure bégnine de Pierre Veber met fin au combat.
Lorsque ce duel intervient, Blum compte une vingtaine d’années de critique littéraire et dramatique derrière lui. Entre 1908 et 1911, il a livré plus de 270 chroniques de théâtre au journal Comoedia, avant de poursuivre son œuvre dans Le Matin. Sans être le nouveau Sainte-Beuve, il s’est taillé une place dans ce monde des lettres, et c’est cette vocation qui nourrit ses amitiés plus que son travail au Conseil d’État.

En raison de l’épidémie de CoVid-19, le domaine d’Arnaga reporte son ouverture à une date qui n’est pas connue à l’heure actuelle.
En temps normal, les horaires d’ouverture sont les suivants :

Du 1er AVRIL au 30 JUIN et du 1er SEPTEMBRE au 1er NOVEMBRE de 9h30-12h30 et 14h-18h

Du 1er JUILLET au 31 AOUT de 10h à 19h Ouverture du domaine à 14h le 1er septembre.

Visites guidées, visites thématiques, balades théâtralisées : consulter www.arnaga.com.

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